samedi 5 avril 2008

Funny games



De tous les films que j'ai vue de ma vie, Funny games est probablement l'un des plus ingénieux. Le film traite du thème de la violence avec un ton et style qui lui est définitivement propre. C'est le seul film de ma vie où j'ai vue un film se retourner contre son spectateur et lui poser un jugement qui le fera réfléchir des jours et des jours de temps. Je recommande fortement ce film de Michael Haneke. Il s'agit, selon moi, d'un chef d'œuvre que malheureusement trop peu n'ont pas compris.

jeudi 21 février 2008

Carmen et Lysias, au menu du banquet.


1 :50 du matin, la pensé de me coucher traverse mon esprit. Alors que je me brosse les dents, je me suis fixé le blanc des yeux comme je le fais si souvent, pour finalement tomber dans une envie d’écrire subitement. J’avais repensé à ce que Gabriel avait écrit dans ce message sur un personnage quelconque nommé Carmen. Les quelques citations qui accompagnaient le nom de cette femme en disaient long sur elle.


Si tu ne m'aimes pas, je t'aime
Et si je t’aime, prends garde à toi.


Je ne t'aime que parce que tu ne m'aimes pas. Alors si je t'aime et que tu me laisses entrer dans ta vie, tu vas prendre du mal.


La première fois que mes yeux ont lu ces passages, j’ai éprouvé une certaine colère face à ce qu’ils signifiaient. Le sommeil ne venait plus, il fallait que j’écrive, mais j’étais plongé la tête première dans les profonds marrais de mes réflexions. Les mots se faisaient la guerre, et il m’était impossible de m’endormir dans de telles conditions, mais ça ne me dérangeait pas. Je me sentais encore une fois dans un duel. Contre qui ou quoi, je l’ignorais. Peut-être que c’était moi que j’essayais de vaincre, peut-être Carmen. Son discours me rappelait exactement Phèdre de Platon. Dans ce dialogue, Socrate et Phèdre analysent le discours d’une lettre de Lysias qui est en fait une déclaration d’amour. Carmen et Lysias ont pratiquement utilisé les mêmes paroles. Socrate, évidemment, détruit les arguments de Lysias avec une agilité qui lui est connue, mais je ne les trouvais point pertinents et ne m’ont pas vraiment impressionné, encore moins convaincu.


La raison pourquoi je n’étais convaincu par les arguments de Socrate était très simple. Je ne crois pas que le problème soit de savoir si Carmen ou Lysias ont tort d’aimer de cette façon. Je suis justifié de croire que le problème est que Carmen et Lysias ne ressentaient tout simplement pas d’amour tout court. Bien sûr l’amour est une notion très complexe à définir. Mais ce n’est pas vraiment un problème de définition. Avant d’aborder Carmen et Lysias, entendons-nous sur la notion d’amour.


Les mots sont subjectifs pour définir l’amour, mais je crois que l'on peut trouver un terrain d’entente qui est selon moi commun avec la plupart des personnes. Toutes les fois que j’ai tenté de définir l’amour, j’en reviens à cette définition :


C’est une relation de communication très intense où la plupart des barrières émotionnelles et physiques disparaissent et les individus impliqués tentent de toucher les autres au plus profond de leurs âmes (dans un sens non spirituel).


J’exclus la dimension sexuelle, car le sexe et l’amour sont deux notions complètement différentes. On peut aimer son enfant sans avoir de désir sexuel à son égard, mais malheureusement ce n’est pas toujours le cas. Je crois que l’on peut faire abstraction de ces cas d’exception, car je crois que ce sont des cas extrêmes, et l’on ne peut rien bâtir avec des cas extrêmes. J’exclus aussi l’amour des choses matérielles, qui ne me semble pas pertinente pour ce message.


Comment aime-t-on ? Directement, secrètement, les façons sont multiples. Pourquoi aime-t-on ? Les raisons sont infinies. Cela ne veut pas dire que toutes les raisons sont valables, et par valable je n’essais pas de créé un code d’éthique, mais plutôt en terme de valeur de vérité. Je suis justifié de croire qu’il y a des raisons qui transportent l’amour hors des frontières de sa définition, ou encore qui la transforme en quelque chose qu’elle n’est pas. Je crois que cette situation se produit lorsque certaines conditions sont enfreintes. Les premières qui me viennent à l’esprit sont celles-ci, mais je suis convaincu qu’il y en a d’autres.


- Respect de la liberté physique et mentale.


- L’honnêteté


- L’éducation


- Le rapport hiérarchique, qu’il soit supérieur/inférieur ou un rapport d’égalité.


- La réciprocité


Il y en a sûrement d’autres, mais je crois que ce sont quand même certaines des conditions importantes pour que l’amour puisse avoir lieu. L’amour ce n’est pas n’importe quoi. Ce n’est pas le charme, ce n’est pas le sexe, ce n’est pas l’admiration, encore moins l’obsession et la possession. C’est là que Carmen et Lysias se trompent lorsqu’ils parlent d’amour. Ce n’est pas de l’amour dont ils parlent tous les deux. Bien entendu, on peut aimer quelqu’un sans que l’autre personne n’ait l’intention de redonner de l’amour en retourne. Mais s’y entêter tombe dans l’obsession. Je ne crois pas que Carmen et Lysias sont obsédés par les autres, justement, ils ne veulent pas que les autres les aiment. Ils ont peur d’aimer. Ils ont peur de faire du mal. Mais avoir peur des gens, cela va à l’encontre de toutes sortes d’amour. C’est la peur tout court. On peut avoir peur de ressentir de l’amour ou encore de le dévoiler. La fin de la peur n’est cependant jamais l’amour, mais la peur elle-même, et parfois même bien plus. On peut penser à la distance que cela créé entre deux personnes, ce que l’on ne souhaiterait pas si l’on n’avait pas peur. Il y a aussi les mensonges qui s’installent entre ses deux personnes pour ne pas révéler leurs positions. Si l’on a peur d’aimer, c’est n’est pas parce qu’on a nécessairement peur de faire souffrir, du moins pas en totalité. C’est peut-être parce qu’on ne s’aime pas assez que l’on a peur d’aimer. Encore là, on peut avoir peur d’aimer, car l’on croit que l’on va vite se lasser de l’autre. Si c’était le cas, je crois que ce serait parce qu’on ne connaissait pas assez l’autre personne ou encore, que l’on ne se connaît pas assez. Mais si l’on part du fait que l’on se connaît, par conséquent nous savons ce que nous aimons et ce qui est bon pour nous (c’est difficile bien sûr, mais cela me semble essentiel) il n’y a pas de raison de se lasser de cette personne, à moins qu’elle en soit pas comme nous. Si c’est le cas ça revient à se nuire à soi-même, et toutes personnes qui acceptent cela n’auraient aucune raison de se plaindre par la suite. Bien entendu, ce n’est qu’un rêve. Les gens disent l’affirmer la plupart du temps, mais ce n’est pas le cas, ils tombent dans d’innombrables illusions. Si la personne s'avère être autre chose que ce que l'on croyait qu'elle serait, c’est un simple malentendu, mais ce n’est pas le cas de Lysias et de Carmen. Pour ce qui est de la peur de posséder l’autre, c’est très simple à réfuter, car cela va à l’encontre des conditions. Même chose lorsque l'on nuit à la liberté physique et de pensée de l'autre. Pour ce qui est de la peur de faire souffrir, c’est plus complexe. Dans le cas de Carmen et Lysias j’en déduis qu’il s’agit d’une souffrance mentale et non physique, et donc j’emploierais le terme souffrance en insinuant qu’il s’agit de souffrance émotionnelle. Je crois qu’il y a des prémisses à prendre en compte :


- Toute souffrance est inévitable


- Personne n’est entièrement à l’abri des souffrances.


- Chaque personne a le pouvoir de choisir comment il affronte la souffrance.


- La souffrance nous apprend des choses et nous aide à nous définir.


- Donc, la souffrance est à un certain essentielle dans l’existence.


Si l’on est d’accord avec ses prémisses, il est alors évident que Lysias et Carmen ne les respectent pas. Je suis justifié de croire que de faire souffrir les gens fait partie de l’amour, car en les protégeant de la souffrance, nous les empêchons de se définir et d’apprendre des choses qui peuvent leur être essentielles. Aimer quelqu’un c’est lui apprendre aussi à vivre avec les souffrances du monde. C’est lui apprendre qu’il y a autre chose que la douleur ou encore derrière cette douleur. S’empêcher d’aimer c’est s’empêcher de vivre soi-même et de faire vivre les autres. Bien entendu, je ne connais pas Carmen autre que les quelques lignes que j’ai lu sur ses dires. La même chose pour Lysias, que Socrate et Phèdre ne confrontent jamais directement, et ce, tout le long du dialogue.


Pour ce qui est de l’aspect liberté, je crois que la liberté et l’amour sont deux choses différentes. Ça ne veut pas dire qu’elles n’ont pas de relation l’un envers l’autre, au contraire, cela fait même parti de mes conditions. Et le fait qu’elles interagissent ensemble ne veut pas dire qu’elles sont inversement proportionnelles. Je ne crois pas en cette règle imaginaire ou rumeur quelconque. On tombe dans l’erreur logique, ce qui ne mène à rien, sans impliquer que l’amour ait quoi que ce soit de logique. Si l’on respecte les conditions de départ, mentionné plus haut, la liberté et l’amour ne se nuisent même pas. Bien sûr c’est de la théorie, dans la pratique il faut parler et agir. D’où l’importance de la communication et de trouver quelqu’un comme soit. Pourquoi aurions-nous peur alors ? Avoir peur de quelqu’un comme nous reviendrait à avoir peur de notre personne. Si la liberté devient un problème, c’est qu’elle a mal été communiquée au départ tout simplement. Si l’on a peur de communiquer, c’est un problème qui en amènera beaucoup d’autre, de plus cela enfreint l’une des conditions. Le libertin place sa liberté au-dessus de tout, c’est vrai. Aimer si l’on respecte les conditions, n’est pas un sacrifice de liberté. Ça n’empêche pas certains de l’interprété ainsi, mais je crois que ces personnes se trompent de la même façon qu’ils se trompent en disant qu’ils aiment les autres lorsque ces derniers ne les aiment pas.


On peut avoir peur du changement. C’est normal. Ce que nous amène l’amour peut nous faire peur, car nous avons peur de perdre des milliers de choses. Bien entendu, l’amour change notre univers et amène d’autres complications, tout comme n’importent quels autres événements. Le changement qu’amène l’amour, n’est pas propre à l’amour seulement. Certaines complications sont moins plaisantes que d’autre bien entendu, mais si l’on est avec quelqu’un qui est comme nous, les complications deviennent familières et les craintes peuvent devenir compréhension. Parfois, j’ai l’impression que l’amour est comme la connaissance, elle nous fait réaliser que nous ne sommes pas le Dieu que nous souhaitons être. Être un Dieu sans souffrance et libre comme tout. Je crois que cela fait parti du problème. En amour nous ne sommes pas Dieu et cela ne nous plaît pas. Je crois que c’est parce que naturellement, on ne tend pas vers les conditions d’amour. Nous tendons vers Dieu, naturellement, tout en l’ignorant. C’est en connaissant le monde que l’on se rend compte que nous n’en sommes pas un. L’amour est l’une des connaissances qui nous éloignent le plus de la tendance d’être Dieu. On pourra me reprocher d’avoir trouvé des conditions envers lesquelles nous ne tendons pas. On peut en comprendre que l’homme n’aime pas de façon naturelle. Je n’y crois pas justement. Je ne crois pas que l’homme est une créature capable d’amour dès la naissance. L’amour s’apprend ou reste dans l’ignorance. Je crois qu’à la base l’homme est égoïste, assoiffé de puissance, ou encore de Dieu. Est-ce qu’il y a un lien entre la liberté et vouloir être un Dieu ? Selon moi oui. Je ne crois pas que cette raison, que l’homme ne tend pas vers l’amour de façon naturelle, soit recevable ou pertinente pour se débarrasser des conditions. On ne se demande pas si l’homme tend naturellement vers le meurtre pour résoudre des problèmes. La réponse est oui, puisqu’il l’a toujours fait. Ça n’empêche pas que les hommes de prendre connaissance que cela ne mène à rien de pensée comme cela. Ce qui m’amène à dire que ce que l’on tend naturellement n’est pas nécessairement bon et vice versa. On peut aussi dire que c’est notre tendance égoïste naturelle qui nous amène à posséder les autres ou encore y trouver refuge ou en devenir prisonnier. Je répondrai que vous violez les conditions et que dès lors ce n’est plus de l’amour justement. Dès lors l’amour on peut s’en égarer facilement, diraient certains. Je crois que oui. L’amour ce n’est pas n’importe quoi, ni n’importe qui. C’est ce qui rend cela si précieux. C’est ce qui fait qu’on y revient souvent.


Si je peux me permettre, je vois même une relation entre l’amour et l’écriture. Quand j’écris, je ne sais pas vraiment pour qui exactement. Je pense qu’écrire est en fait, tout comme la philosophie et la connaissance, c'est une recherche de l’amour. Quand j’écris, je ne peux m’empêcher de vouloir être compris dans ce que j’écris. Je me dis que la personne qui lit ce message va me comprendre, du moins j’espère. Cependant, la façon dont elle comprendra ce que j’écris et ressens, ainsi que le degré de compréhension qu’elle aura des mots que j’écris, affectera beaucoup l’amour que je pourrai éprouver pour cette personne, qu’elle soit une femme ou un homme. Être compris c’est aussi ça l’amour. Par l’écriture, nous testons indirectement les gens. À savoir, comment peuvent-ils nous comprendre, jusqu’à quel point peuvent-ils le faire ? La personne qui comprendra exactement ce que je dis respecte mes conditions et par conséquent je l’aimerai, que ce soit une femme, ami, un enfant. De plus, je n’aurai pas à avoir peur.


Ça n’empêche pas Carmen et Lysias d’utiliser le mot aimé. Ils ont le droit de croire ce qu’ils veulent bien croire. Je ne crois pas que ce soit de l’amour par contre. Je n’y vois que de la peur au contraire. Je n’y vois qu’un Dieu. Être Dieu c’est prendre la liberté des autres. Peut-être que l’amour et Dieu ne peuvent faire bon ménage. Mais je crois que je m’écarte du but de ce message en m’avançant sur ce terrain. C’est une autre ligue, d’autres prémisses. Je crois qu’il est temps de dormir maintenant. Je suis justifié de croire que j’ai écrit la plupart de mes pensées. S’il y autre chose à être dit, il en relève de futures confrontations philosophiques qui me mettent déjà l’eau à la bouche. L’amour ne peut en être que gagnant de ses confrontations. Je vais donc me taire, avant que mes doigts n’en tapent plus.


mardi 19 février 2008

A history of evil


A History of Evil

N'oublions jamais Orwell








Freedom is the freedom to say that two plus two make four. If that is granted, all else follows.

De toute mon existence, il y a seulement deux romans que j’ai lus à plus d’une reprise : 1984 et l’hygiène d’un assassin. Lire 1984 est devenu une tradition annuelle très plaisante que je n’ai aucunement l’intention de changer. Chaque lecture est une redécouverte d’un trésor de l’imaginaire humain. Il y a plusieurs raisons faisant en sorte que j’apprécie particulièrement ce roman dystopique par excellence.

Dès le début, Orwell nous plonge en pleine atmosphère du régime de l’Océanie. Bien entendu, il n’a rien inventé au culte de la personnalité que l’on peut percevoir avec l’icône Big brother, mais c’est au niveau des rapports sociaux entre les citoyens de l’Océanie qu’il arrive à aller nous chercher. Il décrit une société qui n’a rien à offrir d’autre que la haine qu’éprouvent les divers citoyens les uns envers les autres. La haine est en fait la solution pour la rendre immortelle. Il décrit les mœurs des citoyens ainsi que le genre de travail qu’ils accomplissent, et ce, avec une froideur troublante. Les deux minutes de la haine sont clairement un bel exemple des événements quotidiens les plus intéressants.

Il y a plusieurs phénomènes et concepts ensorcelant dans le roman, mes deux favoris sont définitivement le « Newspeak » et le « double thinking ». Le Newspeak est la nouvelle langue que le régime impose petit à petit. Il s’agit de la langue anglaise après avoir subi une cure d’amaigrissement au niveau vocabulaire. Par exemple, le mot mauvais (bad, en anglais) est éradiqué du vocabulaire pour le remplacer par « ungood » ou inbon en français si je ne me trompe. Meilleur et excellent sont aussi retiré pour être remplacé par « très bon » et « doublement très bon ». Parenthèse intéressante, après avoir eu mes cours de philosophie du langage je me suis rendu compte qu’en fait le Newspeak ressemble à ce que Frege, Russell et les autres philosophes voulaient créer comme langue, une langue purement logique. Retirant toutes les contradictions métaphoriques et grammaticales. Une langue ne pouvant laisser place à l’erreur d’interprétation. Le newspeak non seulement élimine des mots considérés comme inutiles et trompeurs, mais il raccourcit les mots qui peuvent l’être, et ce jusqu’au limite du possible. Un exemple marquant se matérialise alors que le personnage principal, Winston Smith, est à son bureau. Il reçoit une note des correctifs qu’il doit apporter à un article de journal :

“Times 3.12.83 reporting BB dayorder doubleplusungood refs unpersons rewrite fullwise upsub antefiling” - p.41 de l’édition penguin.

Bien entendu, l’auteur traduit ce qu’une telle note voulait dire un peu plus tard, mais il est intéressant d’y voir une ressemblance avec le langage pratiqué par les jeunes adolescents sur MSN. Bien entendu, le « langage msn » n’a pas été imposé par un régime totalitaire, c’est selon moi ce qui est de plus troublant. Le but de parlé en langage est msn est une paresse intellectuelle flagrante et culturellement dangereuse à mon avis même si les avis sur l’avenir du français au Québec se contredisent à plus d’un niveau. Le but du Newspeak n’est évidemment pas le même que celui des adolescents. Les « ados » veulent être cool et rapides, alors que le newspeak est un instrument pour tendre vers le pouvoir. Cependant, la conséquence de l’utilisation de l’un où de l’autre mène à la même chose, un appauvrissement intellectuel considérable. En éliminant des mots involontairement ou volontairement, nous négligeons un moyen de nous exprimer. Ne pas savoir la différence entre la crédulité et naïveté peut faire une différence lorsqu’on tente d’exprimer un état d’esprit que nous ressentons et confondre les deux ne nous mène à rien. Ne pas savoir la différence entre le mépris et la haine peut aussi s’avérer problématique. Non seulement on ne peut décrire ce que l’on ressent, mais cela laisse aussi place au doute par rapport à ce que l’on ressent. Ce qui m’amène à une parenthèse philosophique. Peut-on se permettre de tenir pour savoir quelque chose que nous sommes en l’incapacité de décrire ? Il est difficile d’avoir un diagnostic médical efficace lorsque l’on est dans l’impossibilité de décrire les symptômes de ce que nous aurions. Tout cela rend fascinant l’aspect du langage dans l’univers du roman.
Le deuxième aspect est le « double thinking » qui est défini comme suit :

The power of holding two contradictory beliefs in one's mind simultaneously, and accepting both of them

Par exemple, le mot blackwhite. Logiquement il est impossible qu’un objet soit à la fois noir et blanc à la fois dans sa totalité. Cela demande alors un tour de force logique et de déni. La chaise peut-être blanche et noir à la fois, cela varie uniquement en fonction des désirs des personnes au pouvoir. Si Stephen Harper me dirait cette chaise est noire, alors que je sais pertinemment que ce n’est pas le cas, alors il faut que je me force à croire qu’elle est en fait noir, qu’elle a toujours été noire et qu’elle sera toujours noir dans le futur à venir. Et vice versa la minute où M. Harper changerait d’idée. Cela demande un tour de force logique incroyable et aussi une forte capacité à nier les choses, car il faut que j’oublie que je savais que cette chaise était blanche et que je crois avec tout mon cœur qu’elle est en fait noire.

Autres les concepts, plusieurs thèmes sont mis en valeurs à travers son livre. La première partie du livre introduit principalement l’univers de l’Océanie, la deuxième porte principalement sur l’histoire d’amour entre Winston et Julia et la dernière partie, et non la moindre comporte sur la souffrance et la raison. L’amour est abordé vraiment d’une façon non idéaliste et nous amène à nous poser plusieurs questions. Cette vision de l’amour est très connexe à l’image de l’homme qu’Orwell montre tout le long du l’histoire. L’homme est vraiment une créature égoïste et Orwell l’exprime à plusieurs occasions qu’il s’agisse d’enfants ou même d’amoureux. Tout ce qui est abordé dans la troisième partie est un trésor en soi. La troisième est définitivement la meilleure du livre et je suis justifié de croire que je n’ai jamais rien lu d’aussi terrifiant de toute ma vie. Les dialogues, entre les deux personnages présents principalement dans cette partie, sont tellement absorbants. Il y a une relation maître-élève et à la fois persécuteur-victime très intéressante. Tout le long, la raison de Winston, ainsi que son corps entier fait face aux pires tortures. Son esprit est constamment confronté au « double thinking » et doit faire face à une dite réalité. La tourmente fait place à une fin choquante, troublante, ne pouvant laisser qui que ce soit indifférent.

Autre thème intéressant est évidemment la guerre perpétuelle des trois superpuissances du monde : l’Océanie, l’Eurasie et l’Est-Asie. Tout le long de l’histoire, une ambiance de guerre se fait constamment sentir. Des bombes tombent aléatoirement dans la ville de Londres. Il y a aussi des défilés militaires, la semaine de la haine, etc. Ce qui est encore plus fascinant c’est que cette guerre est tellement continuelle qu’elle cesse alors d’être menaçante. Les superpuissances sont pratiquement en termes de forces et d’armements au même niveau et donc aucune d’entre elles ne peut avoir d’avantage quelconque sur une autre, sauf en faisant une alliance quelconque. Le dilemme des guerres reste le même, les trois super nations restent sur leurs positions et n’ose risquer une défaite humiliante. Alors, elles ne font que reprendre les mêmes territoires sans cesse et changent leur diplomatie continuellement, préférant toujours s’allier à deux pour en attaquer une, puis du jour au lendemain, canceller l’alliance et attaquer l’ancien allié avec l’ancien ennemi.

Ceci n’est qu’une fraction des choses qui m’intéresse tant de ce roman. Sans compter les slogans tellement accrocheurs et troublants que le maître de la dystopie George Orwell a pensés. Il a créé un univers riche en détail pour le rendre très terrifiant et juste assez réaliste. Cependant, après avoir lu ce roman ont ne peut que constater que plusieurs des choses décrites par Orwell en 1949, ce produise aujourd’hui et presque aussi pire. Tout cela faisant d’Orwell un écrivain remarquable ainsi qu’un visionnaire. Il est tellement dommage qu’il n’est jamais vécu assez longtemps pour connaître le succès de son livre. Je ne pourrai jamais recommander assez ce chef-d’œuvre de George Orwell.

War is peace

Ignorance is strength

Freedom is Slavery





dimanche 10 février 2008

le mur noir

Cette réflexion, j'ignore pourquoi je l’écris, je n’ai que des justifications. Je l’écris pour moi et pour toi. Il serait folie que je n’écrive que pour moi et cela serait pure négligence si je n’écrivais que pour les autres. Cette réflexion voit la comme un soupir. Je me suis dis que de partager ce soupir serait un bon moyen de commencer ce blog.

Plusieurs diraient que je suis frappé d’une crise du mal de vivre. Certains appelleraient même cela une surdose de nihilisme. Mais je ne méprise pas la vie, bien au contraire. Je ne tenterais pas de l’analyser ou encore de philosopher avec les autres pour changer leurs perceptions du monde extérieur si j’étais un pur et dur nihiliste. Je n’arrive toujours pas à trouver un sens à la vie et cela me réconforte de plus en plus. Le soupir dont je te ferai part n’est fondé que sur une interprétation de ce que j’ai vu. Je crois cependant que les leçons que j’en tire sont importantes.

L’autre jour, alors que j’étais à la bibliothèque nationale, je vis un vieil homme assis à ma droite cesser de lire son livre pour fixer quelque chose à sa droite. Curieux de nature, je me demandais ce que ce vieil homme devait bien fixer. Il n’y avait rien. Pas de fenêtre, pas de femme, pas de livres. Il n’y avait qu’un mur noir. À plusieurs reprises, je me surpris en train d’observer l’homme qui ne semblait pas souvent détourner son regard du mur noir. Je tomberais dans la spéculation si j’essayais de connaître les raisons pour lesquelles il fixait ce mur, alors il serait impertinent d’y accorder une seule seconde. Par contre, je me permets ceci. Comme Socrate qui essayait de faire accoucher les âmes, j’ai essayé de faire accoucher une pensée qui pourrait m’aider à mieux vivre ma vie. J’étais justifié de croire que je pouvais tirer une leçon de l’homme qui fixe le mur noir devant lui.

Je crois que la première chose à faire serait de se demander ce que mur noir signifie. Après mûre réflexion, je me rendis compte que le mur est d’une simplicité troublante et que je ne peux lui donner un certain symbolisme autre son utilisation. Les souvenirs de mur noir dont j’ai été témoin, directement ou indirectement, sont venu visiter ma conscience, et ce, tranquillement. Voici ce que j'ai constaté.

Certaines personnes fixent le mur pour ne rien voir d’autre. Le monde que le mur cache leur semble plus effrayant que le mur lui-même. Je revois mon père qui me conseille de ne jamais faire confiance à personne. Je le revois me faire part, à quel point il n’est pas heureux dans son mariage et qu’il doute qu’il y a quelqu’un de saint d’esprit dans ce monde. Il multiplie les grossières inductions logiques qui sont la cause de tous ses préjugés. Il n’a jamais cru en rien ni personne autre que lui et en contrepartie n’en inspirait ni une ni l’autre. Il scrute le mur noir pour avoir la paix et ce jusqu'à ce qu'il meurt.

D’autres personnes à force de fixer le mur noir, ont complètement oublié leur existence. Ils sont tellement habitués d’y porter leur regard qu’ils sont devenus ce mur noir. Ils n’ont plus de pensée pour eux même et ne pense qu’aux autres êtres humains qui les fixent en tant que mur. Ils disent vivre pour les autres. Ils s’honorent ainsi, comme s’ils étaient un morceau de casse-tête, ou encore même le mur d’une maison. Mais les murs d’une maison peuvent être détruits ou encore déplacé par les personnes qui y habitent, et pour cette même raison les personnes qui ne sont que mur n’ont aucune existence qui leur est honorable. Ils sont pris entre les surfaces du mur, le corps entouré d’isolant, les protégeant de leurs peurs et surtout d’eux-mêmes. Les pensées qu’ils ont si souvent niées les accompagnent en tant que poussières. Le temps s’écroule et les pensés s’accumulent, l’asphyxions débute. Il y a de quoi de troublant à manquer d’air de cette façon. Comme si nier n’était pas assez, ils veulent ensuite oublier qu’ils sont pris aux pièges dans le mur noir, et qu’ils agonisent. C’est troublant, et très fâchant lorsque l’on en est témoin. Oublier comment respirer ne me semble pas une solution pour oublier que l’on est en train de s’étouffer.

Malgré le risque de se cacher devant un mur noir ou encore d’en devenir un, je crois que l’on ne doit pas les éviter. Les démolirent serait aussi une erreur. Leur présence permet de nous définir et de nous rappeler ce qui peut nous arriver lorsque l’on ne tente pas de voir au-delà de ce que l’on voit. Je ne sais pas pourquoi le vieil homme fixait le mur noir, encore moins de savoir s’il y cherchait quelque chose. Je suis justifié de croire que la prochaine fois que je verrai un mur noir je tenterai d’y voir toutes les couleurs qui s’y cachent, après tout, le noir est composé de toutes les couleurs. Plus important, tant et aussi longtemps que je pousse des soupirs comme celui-ci, je suis justifié de croire que je ne suis pas un mur noir.

Mes poumons sont maintenant vidés de l’air du soupir. Je recommence à respirer normalement et je retourne contempler le monde extérieur pour y trouver d’autres leçons. Leçons et soupirs que j’attends avec impatience de partager, spécialement avec mon compagnon éthylique par excellence qui est en voyage quelque part. Et si un jour, où même en ce moment, tu te sens prisonnier du mur noir, rappelle-toi que respirer est un acte naturel et qu’aucune justice, ni aucun principe transcendantal, ni aucune fatalité ne nous y condamnent. C’est notre propre personne qui s’y condamne. Sur ce, je me tais.